La saison 1965-1966, qualifiée d’exceptionnelle, renoue avec un répertoire qui privilégie « les grands thèmes universels ». Pourtant, la situation du TNM n’a jamais été plus précaire. À l’annonce de la démolition de l’Orpheum, la troupe note ironiquement dans l’un de ses Bulletins qu’à l’instar de l’héroïne de Brecht dans Mère courage et ses enfants, « nous serons bientôt sans toit sur notre tête ». La compagnie lorgne la nouvelle salle Port-Royal de la Place des Arts qu’elle lui croit réservée pour la saison suivante. Or, le gouvernement du Québec décide d’en offrir la location à tous les théâtres. De plus, les gouvernements refusent d’accorder au TNM ce qu’ils ont offert au Festival de Stratford : les moyens nécessaires pour entretenir une troupe d’acteurs salariés. La coupe est pleine pour Jean Gascon. Les deux rêves ultimes qui l’ont motivé toutes ces années – la troupe permanente et la propriété d’un théâtre – ne se seront jamais concrétisés. Espoirs déçus, fatigue, usure… De Stratford, il remet sa démission le 9 août. Jean Gascon, qui aura fortement marqué le TNM, laisse à Montréal un grand théâtre. À la suite de ce départ alarmant, ce grand homme de théâtre, en pleine possession de son art et de son talent, dirigera, de 1968 à 1974, le prestigieux Festival de Stratford en Ontario. Tout en continuant de signer épisodiquement des mises en scène au TNM.